Interview : l'AVERE France et la mobilité électriqueC'est aujourd'hui que débutent les Journées du scooter électrique 2013. Pour leur 1er volet, nous avons recueilli les propos de Charlotte de Silguy, Secrétaire Générale de l'association AVERE France. Elle nous livre à travers un interview sa vision de la mobilité électrique en deux-roues, à scooter comme en VAE.

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S'il est traditionnellement question de « poisson » le 1er avril, c'est aussi le début de la Semaine du Développement Durable, à laquelle nous avons choisi de participer en organisant la 5ème édition des Journées du scooter électrique. Pour le 1er volet de cette trilogie 2013, c'est la Secrétaire Générale de l'AVERE France, Charlotte de Silguy, qui a accepté de répondre à nos questions.

Pouvez-vous nous présenter l'Avere-France ?

L'Avere-France, association nationale pour le développement de la mobilité électrique, a été fondée en 1978 sous l'impulsion de la Commission européenne, après le premier choc pétrolier. C'est la plateforme de référence française de la mobilité électrique. Elle a vocation à stimuler le déploiement des véhicules électriques et hybrides, notamment auprès des collectivités territoriales et entreprises.

Avere France

Les véhicules électriques et hybrides sont devenus une réalité industrielle mondiale et un mouvement irréversible. D'ailleurs, la quasi totalité des constructeurs automobiles mondiaux propose aujourd'hui au moins un modèle. Ils correspondent à une cruciale nécessité écologique, sociétale et économique. Et il est stratégiquement vital autant qu'urgent de diminuer notre dépendance au pétrole et d'améliorer la qualité de l'air...

Néanmoins, comme pour toute innovation technologique majeure en rupture avec des habitudes bien ancrées, son déploiement doit être accompagné. Quelques freins, dont certains sont de nature psychologique, ont besoin d'être levés car il subsiste beaucoup d'idées reçues sur les véhicules électriques. L'Avere-France, en lien avec les pouvoirs publics et les acteurs de la filière, contribue à rendre le terreau favorable au déploiement de ces nouvelles mobilités.

Quelle place occupe le 2 roues dans le paysage de la mobilité électrique ?

Nous cherchons à promouvoir toutes les mobilités électriques, du deux-roues au camion en passant par les véhicules particuliers ou utilitaires, les bus et les bateaux ainsi que les gyropodes. Chacun a ses spécificités et ses usages. Les motos et scooters électriques ont toute leur place dans la grande famille des véhicules électriques.

Les adeptes de ce type de motorisation sont des personnes concernées par la préservation de l'environnement et la qualité de vie, des passionnés des innovations technologiques. Aujourd'hui, beaucoup de gens sont sceptiques devant ces modes de transports, voiture ou deux roues. Ils les voient comme un effet de mode, un gadget pas très puissant, pas très… sexy.

Pas très sexy le scooter électrique ? Ca reste à voir annonce l'AVERE France !
Pas très sexy le scooter électrique ? Ca reste à voir annonce l'AVERE France !

Pourtant, les personnes qui essayent des véhicules électriques sont presque toujours stupéfaites des performances et du plaisir qu'elles ont à les conduire, notamment grâce à leur étonnante puissance silencieuse. Quand elles essaient, elles sont conquises, que ce soit une voiture, un vélo, une moto ou un scooter.

Quel est votre point de vue sur les véhicules électriques légers ?

L'arrivée des véhicules électriques est concomitante de nouvelles tendances fortes en matière de mobilité. Un tournant est en train de s'opérer : la mobilité de demain sera écologique, partagée, multimodale, communicante, rationalisée. En ville notamment, la tendance est à la diminution de la taille des véhicules, électriques ou non, ce qui permettra notamment de fluidifier la circulation, autre enjeu fondamental.

Outre le plaisir qu'éprouvent les adeptes des deux-roues, l'une des raisons principales de leur utilisation en ville est naturellement liée aux embouteillages. Les véhicules électriques légers (VEL) sont particulièrement pertinents et nombre de concepts sont dans les cartons, y compris chez les constructeurs de motos et automobiles de renom.

Le français Renault joue la carte du véhicule électrique léger avec son Twizy
Le français Renault joue la carte du véhicule électrique léger avec son Twizy

Si le Twizy connaît un certain succès, c'est parce qu'il correspond à cette tendance révélant un besoin. Dans les rues de demain, nous verrons très vraisemblablement de nombreux petits véhicules électriques légers (VEL) à une ou deux places. Certains seront même en libre-service.

L'environnement technologique évolue t-il assez vite ?

À la fin de l'ère de la voiture à cheval, au moment de l'arrivée de l'innovation automobile, il y a eu de vives critiques et manifestations de mépris à l'égard des véhicules à moteur (voir notre article Vives polémiques sur l'automobile au début du 20ème siècle). Parmi les freins évoqués à son développement était naturellement pointé le manque d'approvisionnement pour faire le plein.

Les stations services sont arrivées progressivement. Il en est de même pour l'environnement des véhicules électriques. C'est un phénomène nouveau, tout se met en place progressivement. Paris ne s'est pas fait en un jour ! Les bornes de charge sont certes encore insuffisantes, mais les municipalités sont en train de s'en préoccuper, aidées par les pouvoirs publics.

Avec Autolib', les bornes ont fleuri à Paris. Crédits photo : Mairie de Paris / S. Robichon
Avec Autolib', les bornes ont fleuri à Paris. Crédits photo : Mairie de Paris / S. Robichon

À Paris, il existe plusieurs centaines de prises depuis une quinzaine d'années. Aujourd'hui, les nombreuses bornes Autolib' sont accessibles aux deux-roues. Mais il faut prendre en considération le fait que 90% des charges se font sur des lieux privés (domiciles, bureaux, centres commerciaux).  C'est donc dans ces zones qu'il convient de faciliter l'accès à une prise !

D'ailleurs, comme le montre l'étude IPSOS réalisée pour l'Avere-France et Mobivia, 25% des français ont un accès immédiat à un système de charge. Ce taux monte à 50% en zone rurale. Les 15 millions de maisons individuelles en France sont autant d'accès faciles à une charge plutôt que de faire un détour à une station service pour faire un plein d'essence. En voiture ou à scooter, ce n'est pas parce qu'on habite à la campagne qu'on fait systématiquement plus de 80 km par jour !

Quels avantages un scootériste aura t-il en se tournant vers l'électrique ?

Avec un raisonnement purement économique, le surcoût moyen actuel d'un scooter électrique est d'environ 1 000 €. Mais ce montant est amorti en 4 ans sur la base de 20 kilomètres par jour, compte tenu du moindre coût du plein électrique par rapport à l'essence. Et cela sans compter les frais de maintenance, réduits pour l'électrique.

Pour un usage quotidien, l'achat d'un scooter électrique est rentabilisé en 4 années
Pour un usage quotidien, l'achat d'un scooter électrique est rentabilisé en 4 années

Dans certaines villes de France, c'est amorti beaucoup plus vite grâce à une aide locale à l'achat pour les deux roues électriques (subvention qui atteint en général 400 €). C'est le cas à Paris, Nice, Chambéry ou encore Aix les Bains.

Il y a naturellement d'autres avantages, notamment son silence, bien que certains utilisateurs de deux-roues semblent bizarrement adeptes du bruit… Enfin, il ne s'encrasse pas et il n'émet pas de particules nocives pour la santé.

Vers qui se tourner pour obtenir de l'information sur le 2 roues électrique ?

Il existe plusieurs associations régionales pour les véhicules électriques, notamment à Paris (Espace Mobilités Electriques), en région Provence Alpes Côte d'Azur (Avem), en Bourgogne (Bourgogne Mobilité électrique), en Aquitaine (Mobil'éco), et tout prochainement en Nord pas de Calais, avec l'Avere Nord Pas de Calais. Toutes proposent des informations sur les deux-roues électriques, avec parfois la possibilité d'essayer vélos ou scooters.

À Paris, l'Espace Mobilités Électriques (EME) informe et renseigne
À Paris, l'Espace Mobilités Électriques (EME) informe et renseigne

Mi-avril 2013 aura lieu le salon eBikeTec où seront exposés plusieurs modèles. Et régulièrement en France ont lieu des manifestations pour la mobilité durable et douce où l'on peut essayer des deux-roues électriques, notamment pendant la semaine de la mobilité en septembre.

Comment voyez-vous la niche qu'est l'électrique évoluer dans le futur ?

Tout dépend de ce qu'on appelle niche ! Par exemple, en Chine roulent actuellement plus de 200 millions de deux-roues électriques… En Europe, plus de 600 000 circulent actuellement dont 150 000 en France (contre 40 000 en 2011). Ce n'est donc pas un si petit marché et il est en pleine croissance.

Son potentiel dépend moins de contraintes administratives que de freins psychologiques ou de changements d'habitudes. Regardez comment le vélo a évolué dans les villes de France. Il y a 10 ans, on le regardait avec curiosité. Aujourd'hui, il fait partie du paysage, et il y a même des voies dédiées. Par mimétisme, par bouche à oreille, avec la pollution et les embouteillages, de plus en plus de monde s'y met.

Il n'est plus rare de croiser des vélos électriques dans les rues de Paris
Il n'est plus rare de croiser des vélos électriques dans les rues de Paris

Personnellement, jusqu'à ce que j'essaie pour la première fois un vélo électrique il y a 4 ans, j'avoue que je n'y voyais pas beaucoup d'intérêt. Mais j'ai été stupéfaite par le plaisir et l'avantage de conduire un VAE. Cela a été une vraie révélation.

C'est le plaisir du vélo, avec une sympathique dépense physique dynamisante sans l'effort intense qui vous essouffle et vous fait arriver en nage dans un Paris plus vallonné qu'il n'y paraît. J'avale même avec délectation les côtes de Montmartre où je travaille !

Pour le vélo, le scooter ou la voiture électrique, c'est la même chose : quand on essaie, on est conquis, et on adopte. Ensuite, on ne peut plus revenir en arrière, on aurait l'impression de passer d'Internet au Minitel.

De toutes façons, comme le dit Elon Musk, le créateur du roasdter électrique Tesla, un jour, quand nous dirons à nos petits-enfants que nous conduisions de grosses machines bruyantes qui crachaient constamment de la fumée toxique, ils ne nous croiront pas.

Site officiel : avere-france.org.